Changements dans la législation. Qu’en est-il vraiment ?
L’usage de rodenticide dans des postes d’appâtage sécurisés est toujours autorisé mais sous certaines conditions. Tout d’abord, il va falloir faire une analyse des risques, c’est-à-dire qu’il faut donner une ou plusieurs raisons pour faire usage des postes d’appâtage permanents. Sur la base de cette analyse des risques, le nombre de passages annuels sera déterminé, en sachant que la législation conseille un passage tous les 35 jours. Néanmoins, ce nombre de passages sera déterminé par le professionnel en charge de la lutte sur la base de son analyse et de son expérience dans le domaine. Par contre, la substance active utilisée dans ces postes d’appâtage permanent ne peut plus être le Brodifacoum. Sur les postes d’appâtage, il faudra placer une étiquette qui reprendra une série d’informations telles que le nom du produit utilisé, sa substance active, le numéro de téléphone du centre antipoison etc.
Le reste des changements est anecdotique. Par exemple, il faudra qu’apparaissent dans les rapports le nom de la personne à contacter dans l’entreprise, le référentiel de l’entreprise à savoir si elle est BRC, ISO etc.
Quelques réflexions sur la lutte contre les organismes nuisibles aux intérêts de l’Homme.
Depuis quelques années, nous entendons souvent parler de biodiversité, de problèmes environnementaux, du bien-être animal et bien entendu, le monde du Pest Control n’y échappe pas. Les sociétés du Pest Control vantent leur professionnalisme, leur compétence en environnement ou leur connaissance de la biodiversité. Elles parlent également d’espèces ciblées ou non ciblées ou encore d’espèces nuisibles ou utiles.
Tout d’abord, il n’y a pas d’espèces nuisibles ou utiles ! Il n’y a que des espèces qui engendrent des nuisances aux intérêts des Hommes comme par exemple leurs habitations, leurs denrées alimentaires et leurs animaux domestiques.
On veut réduire l’usage des biocides afin de réduire leur impact sur notre environnement et par la même occasion sur nos ressources alimentaires (cultures, bétail, etc.) afin de préserver notre santé. C’est une excellente chose, mais pour ma part cela ne devrait pas concerner le Pest Control en entreprise.
Les appâts toxiques sont dans des boîtes sécurisées qui se trouvent généralement à l’intérieur d’une entreprise. Le risque qu’une espèce non ciblée (chien, chat, hérisson, etc.) puisse manger l’appât toxique est nul. Concernant les empoisonnements secondaires, c’est-à-dire qu’une proie empoisonnée (souris) puisse être consommée par un prédateur (renard, rapace, chien, chat, etc.) est, pour ma part, quasiment nul. En effet, un rongeur qui consomme un appât toxique va mettre 3 jours pour mourir. Durant ces 3 jours, il va aussi bien circuler à l’intérieur qu’à l’extérieur du bâtiment. Le produit va être métabolisé par le rongeur, ce qui réduira sa toxicité en cas d’ingestion par un prédateur. De plus, il faudrait que le prédateur consomme plusieurs rongeurs empoisonnés pour atteindre une dose qui lui serait fatale. Enfin, les rongeurs empoisonnés se retrouvent dans un état d’affaiblissement général, obligeant ces derniers à trouver un abri (terrier, tas de bois), où il finira par mourir. Il s’agit d’une réaction instinctive pour échapper aux éventuels prédateurs. C’est ce réflexe de survie qui va réduire les possibilités offertes aux prédateurs de consommer des rongeurs empoisonnés.
Non aux appâts « no tox » (non toxiques).
Il ne sert à rien d’utiliser des appâts non toxiques si on souhaite lutter efficacement contre les organismes qui causent des nuisances aux intérêts des Hommes et si on souhaite réduire les quantités de biocides utilisées. En effet, en cas d’utilisation d’appâts non toxiques, les souris qui pénètreront dans l’entreprise ne seront pas neutralisées. Elles pourront s’installer, se reproduire, causer des dégâts et souiller les marchandises produites ou stockées. Il faudra plusieurs jours, voire plusieurs semaines, pour se rendre compte de leur présence et pour être réactif. Dès lors, il faudra placer des produits toxiques pour un traitement curatif qui pourrait s’étendre sur plusieurs semaines. Les quantités de produit biocide utilisées seraient importantes et le nombre de cadavres potentiellement disponibles pour d’éventuels prédateurs plus important. Autrement dit, les effets recherchés en utilisant du « no tox », à savoir l’utilisation d’une quantité moindre de biocides et la réduction de l’éventuel impact sur des espèces non ciblées ou sur la biodiversité, ne seraient pas atteints, bien au contraire. De plus, les nuisances (dégâts, excréments, non-conformité en cas d’audit, etc.) seraient plus importantes. Il n’y a donc aucun intérêt à utiliser des appâts non toxiques d’autant plus que le client paie pour éviter ce genre de problèmes.
Utilisation de pièges comme solution alternative à l’emploi des biocides !
Les plaques de glu
L’utilisation de plaques à colle comme moyen de lutte contre les rongeurs est interdite car considérée comme cruelle envers les animaux ! Les plaques de glu pour les insectes (désinsectiseurs) sont obligatoires dans les zones de production. Les insectes ne seraient-ils plus considérés comme des animaux ou considèrerait-on que la souffrance des insectes est moins importante que celle des rongeurs ?
Bien que l’usage de plaques de glu pour éliminer les rongeurs soit une procédure « cruelle », d’autant plus que l’animal va mettre un certain temps avant de mourir d’un arrêt cardiaque, on devrait pouvoir continuer à les utiliser mais uniquement dans les cas où les autres solutions traditionnelles (appâts et pièges mécaniques) se sont montrées inefficaces. En effet, lorsque rien ne fonctionne et que les rongeurs courent partout en faisant des dégâts ou en souillant les marchandises de leur urine et de leurs excréments, nous nous retrouvons devant le dilemme suivant : faire le nécessaire pour pallier les problèmes de santé publique et répondre aux attentes des auditeurs mais au détriment du bien-être animal, ou veiller au bien-être animal au détriment de la santé publique et des attentes des auditeurs en termes de lutte contre les « nuisibles » ?
Il serait donc souhaitable que les autorités compétentes définissent les priorités afin que nous puissions travailler correctement !
Les pièges mécaniques
Dans le cadre de la lutte contre les organismes causant des nuisances, les pièges mécaniques placés dans les boîtes à rats sont peu efficaces ou pas assez performants et ce pour plusieurs raisons :
- On a filmé des rats adultes qui contournaient les boîtes plutôt que d’y entrer. Cela est également valable lorsqu’il y a des appâts au lieu d’un piège. Cela tient au fait que les rats adultes sont beaucoup plus méfiants envers tous les changements dans leur environnement. Les jeunes rats pénètrent plus volontiers dans les boîtes car ils découvrent et explorent leur environnement.
- Les rats apprennent rapidement et lorsque l’un de leurs congénères se fait prendre dans un piège les autres comprennent qu’il faut l’éviter.
- Lors du nettoyage des locaux, les pièges peuvent être déclenchés s’ils sont heurtés. Le piège devient donc inefficace.
- Lorsqu’il est déclenché, soit par accident soit par la capture d’un rat, il faut réarmer constamment le piège. Cela demande beaucoup de temps et d’énergie en plus d’un contrôle régulier et permanent afin de s’assurer du bon état de fonctionnement du piège.
- Il y a aussi un risque d’avoir un rat qui pourrit dans le piège si on ne le contrôle pas régulièrement (tous les 2 à 3 jours). Il y a un risque de développement d’asticots, de mouches et de bactéries.
- Les pièges ne sont jamais sélectifs, c’est-à-dire qu’une espèce non ciblée comme une belette, une hermine, etc. pourrait être tuée par ce type de piège à rats
Une partie de ces inconvénients pourrait effectivement être contrée avec l’utilisation de pièges connectés mais il y aurait d’autres risques comme les bugs informatiques avec l’apparition de tous les inconvénients cités plus haut, le coût énorme de l’investissement (300€ la boîte), la maintenance informatique, etc. Sans oublier que les rats ne rentreraient pas plus dans ce type de boîte que dans une boîte non connectée et que cela n’empêchera pas non plus la capture d’espèces non ciblées.
Le professionnalisme !
Une association de professionnels écossais a pris contact avec une association de professionnels belges pour tenter de répondre à la question suivante : « Qu’est-ce qu’un professionnel du Pest Control ?». Cette question leur a été posée par les États et les gouvernements qui doivent acter, par exemple, que l’usage des plaques de glu pour lutter contre les rongeurs soit exclusivement autorisé pour les professionnels !
Bien évidemment, les grosses sociétés parlent des diplômes, des formations, des connaissances en environnement et de l’écologie des « nuisibles ».
Pour ma part, il est d’abord primordial pour un professionnel de savoir prendre le temps, d’écouter, de comprendre les inquiétudes du client et de lui donner des explications claires sur les problèmes qu’il rencontre avant de chercher à lui vendre un service, en lui faisant croire qu’un traitement est impératif. Ensuite, il faut identifier le problème, déterminer s’il faut agir ou non et enfin, en cas de besoin, trouver la solution la plus efficace et la moins onéreuse pour régler le problème. Bien évidemment, toute cette procédure n’est possible que si on est un minimum honnête et si on a les connaissances nécessaires en écologie animale, en biocides, en législation, etc. En somme, si on est tout simplement compétent dans notre domaine.
Enfin, en tant que naturaliste passionné par tout ce qui touche à l’environnement, si j’étais convaincu que l’usage des biocides dans les entreprises posait un réel problème environnemental, je serais le premier à militer contre leur usage. En tant que professionnel, il est de mon devoir d’écouter, de comprendre et d’informer mon client, mais aussi de trouver les solutions les plus efficaces pour répondre à ses attentes, à savoir, être administrativement en ordre dans le cadre de la lutte contre les organismes causant des nuisances à ses intérêts et avoir un plan de lutte efficace pour éviter à son entreprise tous les désagréments engendrés par les éventuelles intrusions de « nuisibles », sans perdre de vue ma responsabilité vis-à-vis des écosystèmes et de la biodiversité.
Un conseil, une explication, peut parfois régler un problème et c’est gratuit ! Pourquoi ne pas en profiter ?